Les limites à la liberté d’expression du salarié en dehors du travail
Diffamer son employeur en lui imputant des faits humiliants et blessants caractérise un manquement du salarié à son obligation de loyauté et justifie son licenciement pour cause réelle et sérieuse.
C’est l’apport de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 15 juin dernier (Cass. soc. 15-06-2022, n° 21-10.572).
Non, une salariée ne peut pas devant témoins affirmer à l’un de ses collègues (peintre en carrosserie) que selon leurs employeurs, il serait “𝒍𝒆 𝒑𝒍𝒖𝒔 𝒎𝒂𝒖𝒗𝒂𝒊𝒔 𝒑𝒆𝒊𝒏𝒕𝒓𝒆 𝒒𝒖’𝒊𝒍𝒔 𝒂𝒗𝒂𝒊𝒆𝒏𝒕 𝒑𝒖 𝒂𝒗𝒐𝒊𝒓 𝒅𝒂𝒏𝒔 𝒍’𝒆𝒏𝒕𝒓𝒆𝒑𝒓𝒊𝒔𝒆”.
Même si cela se passe en dehors de l’entreprise (à la fête du coquillage par exemple)
Sous peine de voir son contrat de travail rompu pour cause réelle et sérieuse après 14 ans de bons et loyaux services (à 42 ans).
“𝓜𝒶𝒾𝓈 … 𝓈𝒾 𝓮𝓁𝓁𝓮 𝒹𝒾𝓈𝒶𝒾𝓉 𝓋𝓇𝒶𝒾 ?”
Ce n’était pas le cas : les employeurs contestaient avoir tenu de tels propos et la salariée ne soutenait pas qu’ils l’avaient réellement fait.
La Haute Juridiction considère que les propos humiliants et blessants de la salariée étaient adressés afin de donner une mauvaise image de ses dirigeants et de créer un malaise entre ces derniers et les membres du personnel, ce qui caractérisait alors un manquement à son obligation de loyauté.
Puisque la salariée dénigrait l’employeur en affirmant publiquement qu’il aurait tenu de tels propos, elle abusait alors de sa liberté d’expression : son licenciement reposait bien sur une cause réelle et sérieuse.
La Haute Juridiction nous rappelle deux choses :
- les salariés sont bavards : les ragots remontent toujours aux oreilles de la direction ;
- il est possible de sanctionner disciplinairement un salarié pour des faits tirés de sa vie personnelle sous réserve de caractériser un manquement à son obligation de loyauté découlant de son contrat de travail.
Attention, les mots ont des conséquences !